mercredi 9 avril 2025

Une satire acerbe d'une jeune prof.

mercredi 9 avril 2025

 Vous le savez, même si je le mets pas en avant sur le blog, je suis prof de français et j'avoue que lorsque Babelio m'a envoyé en masse critique (merci à eux) "Chroniques noires d'un hussard de la république" publié chez Editions F. Deville (merci aussi à eux,  j'étais intriguée (je l'avais sollicité).
 Il s'agit d'un essai dans lequel la jeune femme explique ses débuts dans l'enseignement et ses déboires (et sa déception) pendant son année de formation, si importante (normalement) quand on rentre de ce beau et dur métier car évidemment, on se fait critiquer à longueur d'année mais plus personne ne veut plus passer les concours malgré les soi-disant conditions de travail idylliques! Et quand on la lit, on comprend pourquoi en partie...

Evidemment, je pense que l'on aborde différemment la lecture de ce livre si l'on sait ce qu'est réellement ce métier, ou que l'on est un simple lecteur qui le découvre. 

Comme toute chronique qui se respecte, on suit les ressentis de cette professeure stagiaire au fil de son année scolaire : partagée entre sa formation à l'ESPE ( École supérieure du professorat et de l’éducation) et ses cours en lycée, la jeune femme découvre le décalage abyssale entre ce qu'on lui professe et la réalité du terrain. 

J'avoue avoir bien ri et par moment, avoir été désolée pour cette jeune femme, qui a la base, est très motivée mais qui, au fil du temps, voit ses attentes s'envoler. Mais le pire est qu'elle rentre dans ce métier! Elle aurait un certain nombre d'années de métier, comme moi, cela pourrait en partie se comprendre (quand on a subi de nombreuses réformes et vu le niveau s'effondrer, par exemple) mais elle? elle arrive juste et si elle est déjà autant désabusée....

Bref, cet essai propose un témoignage intéressant, tantôt drôle, tantôt dur mais qui est à lire pour découvrir ce que c'est réellement que ce métier : tout n'est pas noir, tout n'est pas rose mais si l'on ne garde pas l'espoir, il veut mieux en partir : chaque jour, chaque classe, chaque élève est différent et aucune année ne se ressemble mais je dirais une chose, je suis ravie d'avoir échappé à ces formations mentionnées dans ce livre : celles auxquelles j'ai assisté étaient parfois ubuesques, d'autres passionnantes (et j'y ai beaucoup appris) mais là, on sent que l'on reformate des gens enthousiastes à devenir de bons petits soldats de l'EN (qui n'ont pas le choix s'ils veulent avancer) qui évolueront au gré des réformes à venir, devront se plier aux injonctions contradictoires ou alors, témoignage aussi écouté dans mon établissement, on essaie de dégoûter ceux qui auraient la vocation afin de privilégier des contrats courts et éliminer ainsi progressivement les CDI, emblèmes des fonctionnaires. Le pire étant qu'on est là pour aider la jeune génération à se former car ils sont l'avenir du pays. Assez inquiétant. Elle dit d'ailleurs "Le mot « élève » a été dévoyé depuis longtemps : on ne les élève plus, on nous formate à nous abaisser vers ce qu’on considère être leur « niveau », niveau que nous avons nous-mêmes façonné sur plusieurs générations."

En tout cas, ce texte est bien écrit et je l'ai beaucoup apprécié dans son ensemble (j'ai nettement moins aimé les surnoms parfois limites des formateurs, collègues et autres élèves ici et là qui n'étaient pas nécessaires) et je vous le conseille si vous avez envie de découvrir ce qu'est l'Education Nationale et sans doute pourquoi on en arrive là aujourd'hui. Attention, il est évident que les parents ont leur rôle à jouer et là... bref, c'est un autre débat!

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Cet essai est sorti le 17 février aux  Editions F Deville 

Présentation

Une fois le concours de l’enseignement en poche, on se dit que ça y est : on va pouvoir passer le reste de sa vie à transmettre ce que l’on aime à de charmants bambins en quête de savoir. Le tout avec la tranquille assurance de celui qui se sait en possession d’un CDI à vie, de deux mois de vacances et de 18 heures de cours par semaine. Cependant, il reste encore une ultime épreuve avant une titularisation en bonne et due forme : l’année de stage. Entre un chef d’établissement qui confond gestion d’un service public et entreprise privée, des formateurs porteurs d’une idéologie de la bienveillance, la pression implicite des inspecteurs et celle, plus explicite, des parents désormais acteurs de l’éducation, le stage relève d’une survie en milieu hostile. Quant aux élèves, ils sont relégués au second plan… quelle ironie de la part d’un système qui prétend les mettre au cœur de ses préoccupations.

Mon avis + : Outre la découverte du métier d'enseignant, notre écrivaine revient sur la continuité pédagogique pendant le confinement dû à la COVID : je me suis revue avec les difficultés pour se connecter, essayer de rester en contact avec tous les élèves, le décalage avec le ministre etc. Bref, cet essai balaie large et est vraiment intéressant. Alors certes, si on est ancré dans l'idéologie, ce texte est une insulte mais si on est dans ce métier, même si tout ne nous correspond pas, force est de constater que la dame vise globalement juste et a priori, ça en dérange certains : rappelez-vous, toute vérité n'est pas bonne à dire. Et pourtant, quand on entend le discours de nos politiques (peu importe) et le décalage de ce qui nous arrive, eh bien, on se dit qu'on n'est pas prêt d'améliorer les choses
Fort heureusement, on a des élèves qui s'en sortiront toujours et nous, on essayera au mieux d'aider ceux qui sont en difficultés mais dans une classe hétérogène de 35, vu qu'il ne faut plus faire redoubler ou quasi (cela coûte cher) cela risque de poser de plus en plus problème. L'accès aux écrans dans le quotidien et à l'école ne nous aidera pas. On se s'étonnera donc plus qu'ils lisent de moins en moins et que forcément, la compréhension diminue. 

Bref, j'en resterai là : c'est un livre dur, pas toujours juste et parfois moqueur mais comme je l'ai dit avant, c'est malheureusement une grande partie de la réalité. Cette jeune femme a l'air motivé malgré tout : espérons qu'elle poursuive et trouve de la satisfaction à aider nos jeunes. Quand on les retrouve quelques années plus tard et qu'ils traversent la rue pour vous saluer et vous dire ce qu'ils sont devenus, c'est toujours une joie : un prof ne fera jamais l'unanimité, ne pourra jamais aider tous ses élèves et sachez, que même s'il y a des brebis galeuses comme dans tout métier, la majorité fait de son mieux, voire plus pour les élèves alors qu'aujourd'hui, ce n'est clairement plus le but de l'Education Nationale (manque de moyens? certainement! volonté de annihiler par le bas?  probablement mais dans quel but? paix sociale? contrôler les pensées et en faire de parfaits citoyens obéissants? peut-être?) 

Si vous vous posez des questions sur "le plus beau métier du monde" (enfin, c'est ce qu'on disait autrefois), je vous invite à découvrir ces chroniques noires qui annoncent bien le ton de cette jeune professeure. Encore une fois, c'est un métier riche et passionnant mais parfois lourd à porter. Cet ouvrage est un bon exemple pour le comprendre. 


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