J'aime depuis toujours ce qui a trait au mythe arthurien et à ses légendes : j'ai lu bon nombre de réécritures et si certaines ne m'ont pas toujours plu, ce n'est pas le cas de la dernière "Excaliber" (déjà avec un titre comme cela, cela poussait forcément à l'interrogation ) de Gabriel Katz, publié chez Scrineo et reçu via la Masse Critique de Babelio (merci à eux)
Attention, ça décoiffe! Donc, si vous êtes puritains et que vous recherchez une énième réécriture de la légende d'Arthur, oubliez ou alors, attendez-vous à être surpris car même si tous les éléments sont globalement là, le parti pris est de donner un coup de balai moderne à ces histoires car on va y croiser bon nombre des personnages mythiques de cette légende mais présentés sous un aspect parfois peu reluisants, voire très loin des stéréotypes que l'on a habituellement : je dirai donc : "ou ça passe, ou ça casse", en tout cas, attendez-vous à être surpris.
Le tome "La fabrique des rois" est sorti le 24 octobre et le tome 2 "La guerre des couronnes" est prévu le 16 janvier, donc, il n'y aura pas longtemps à attendre pour lire la suite (ce que je ferai évidemment) Présentation du tome 1 :
La légende des chevaliers de la table ronde, revue à la manière de Gabriel Katz. Manipulation set mystifications
La Bretagne, envahie par des hordes barbares, sombre dans le chaos des guerres fratricides. Dans ces âges noirs où aucun seigneur ne parvient à s'imposer, deux hommes vont échafauder la plus grande supercherie de tous les temps : ils vont fabriquer un roi. Leur choix se porte sur Kay, un jeune noble aussi inconnu que prometteur. Il fondera ses pouvoirs sur une épée prétendument divine, qu'il sera seul à pouvoir tirer d'un rocher. Pour lui donner un trône, les deux hommes recruteront les meilleurs chevaliers du pays et ne reculeront devant rien ni personne. Une machination parfaitement huilée, qui se déroule à merveille... jusqu'à l'entrée en scène d'Arthur, le frère adoptif de Kay.
Les deux hommes à l'origine de ce plan machiavélique, on les connaît aujourd'hui sous les noms de Lancelot et Merlin, et leur histoire est devenue un mythe.
L'épopée de la table ronde revisitée avec brio par Gabriel Katz. Manipulations, jeux de pouvoir, guerre de clans dans un monde où naissent les légendes.
Mon avis : Même si le ton et l'écriture surprennent, il est évident que l'auteur connaît bien le sujet et il s'amuse avec les différentes légendes de ces personnages légendaires : ainsi, bien sûr, on croisera Arthur et Guenièvre, Merlin, Viviane, Morgane, Lancelot (mélangé au personnage de Galaad alors qu'à la base, ce sont deux personnages distincts et est même le fils du précédent) mais aussi Yvain (le chevalier au lion), Tristan (de Tristan et Yseult), Kay le demi-frère d'Arthur (habituellement présenté comme un méchant) etc etc. Bref, ils sont bien tous là mais......... mais........... tellement loin (ou pas, chacun se fera son idée, car au final, car l'auteur en donne sa propre opinion) des images lisses et manichéistes que l'on en a habituellement. Donc, si vous voulez rentrez dans cette histoire, oubliez ce que vous savez ou presque!
Dès le départ, on est dans un monde en guerre dans le royaume de grande Bretagne : celle-ci est l'objet d'attaques récurrentes d'ennemis venant du Nord (aujourd'hui au nord de l'Ecosse) cruels et n'hésitant pas à s'en prendre aux civils. Seul, un roi semble résister, Vortigern, mais celui-ci n'est pas non plus quelqu'un de bien, preuve étant les jumeaux de l'enfer et les Saxons qu'il utilise pour repousser ses ennemis.
Mais dans cette terre qui n'est pas totalement chrétienne (elle est conquise mais pas acquise) un abbé détonne par son comportement et dérange ses pairs : il s'agit de Myrdinn (ou Merlin si vous préférez : étonnant quand on connaît son origine supposée démoniaque), l'homme qui parle aux nuages : il est sous surveillance (sans qu'il ne le sache) accusé d'hérésie et pourtant, il va, avec l'arrivée d'un chevalier solitaire et sans état d'âme, calculateur et tellement loin du chevalier idéal que l'on se fait de Lancelot (ou Galahad ici), fabriquer un roi pour unir le pays et chasser les ennemis de la Bretagne (pas la nôtre) : leur choix va se poser sur fils d'un duc, un peu niais, pas doué avec les armes, Kay et qui est régulièrement humilié aussi bien par leur père que par les autres et notamment son demi-frère adoptif, Arthur, un homme prétentieux, opportuniste et surtout totalement immature (là encore, on est à l'opposé de l'image habituelle légendaire des deux hommes). Myrdinn et Galahad vont aussi créer la légende des chevaliers de la Table Ronde en recrutant les soi-disant 12 meilleurs chevaliers du pays parmi lesquels Tristain, Yvain, Gauvain, Agravain etc. mais si loin des chevaliers idéaux que l'on en a.
Bref, tout semble bien ficelé par Galahad et Myrdinn mais voilà... c'est la légende d'Arthur, pas celle de Kay! je vous laisse donc découvrir comment tout va changer et les conséquences que cela aura pour la suite de l'Histoire.
Je vous l'ai dit, cette réécriture est surprenante puisque l'auteur a choisi de présenter presque tous les personnages à l'opposé de l'image que l'on en a habituellement et je peux comprendre que cela dérange : c'est d'ailleurs un peu déstabilisant au départ. Viviane, "la dame du Lac", habituellement représentée comme une femme magnifique, au charme éthéré, est ici décrite comme petite et boulotte mais à l'intelligence remarquable. Que dire de Guenièvre? là encore, on est loin de son image quasi parfaite et l'on se prend presque à la détester dès le départ, même si la pauvre a des circonstances atténuantes et est l'objet, elle aussi, d'une transaction de pouvoirs (son père est ravi de la céder sans dot!) mais nulle doute que derrière cette froideur glaciale, on devine les prémices du rôle qu'elle aura à jouer dans le destin d'Arthur, de la Bretagne et du sien.
C'est ce que j'ai trouvé le plus frappant dans ce roman, cette réécriture des personnages : bien sûr, l'atmosphère est sombre, dure et cruelle, comme l'était cette époque : tous les coups sont permis pour avancer ses pions et prendre le pouvoir sur cette terre encore à conquérir. Là encore, on est loin d'une image courtoise que l'on a habitude de lire. Attendez-vous à des passages assez crus lors de scènes de batailles.
Bref, c'est plutôt une réussite que cette réécriture qui en surprendra plus d'un mais c'est peut-être ce qu'il faut pour dépoussiérer un peu cette légende ancienne mais qui n'a jamais quitté le devant de la scène : une entrée en matière originale pour des adolescents qui les surprendra, surtout s'ils ont étudié quelques passages ou romans arthuriens au collège. Espérons que pour les autres, cela les pousse à aller découvrir aussi les romans des personnages (le pauvre Tristan en prend aussi pour son grade) et qu'ils n'en resteront pas là : mais vous savez ce qu'on dit, chaque réécriture contribue à élargir et transmettre encore plus un mythe. C'est bien ce que fait ici Gabriel Katz avec sa version à lui. Je lirai le tome 2 pour savoir comment cela va se terminer car même si le destin semble en marche, on est tellement loin de l'histoire originelle que l'auteur peut encore nous surprendre.
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